ZOODOACTU.« Je connais Salif, on a travaillé ensemble à la présidence même s’il est arrivé un peu plus tard. Je l’ai connu lorsque je travaillais à la RAN grâce à Blaise alors Ministre d’Etat délégué à la Présidence, Ministre de la Justice, qui l’envoyait me faire des commissions, demander certaines informations. Salif est une bête politique. C’est le plus aguerri depuis l’université de Dakar. Il est téméraire et courageux. C’est un battant. Politiquement, il fait partie des hommes politiques du Burkina les plus fins, les plus raffinés. Salif est au niveau où il considère que la politique, on l’a fait ou l’on ne l’a fait pas. Il est fort et futé ». Cette description du 1er vice président chargé de l’orientation politique du Mouvement du peuple pour le progrès (MPP) Salif Diallo est de l’ancien conseiller à la présidence du Faso Demba Fofana dans un entretien accordé à l’hebdomadaire L’opinion en aout 2009. De son passage au pouvoir à l’opposition à travers le Groupe des communistes burkinabè (GCB), à l’Organisation démocratique pour le progrès mouvement du travail (ODP/MT) au Mouvement du peuple pour le progrès (MPP) en passant par le Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP), Salif Diallo fait figure d’éminence grise et l’un des acteurs politiques les plus redoutés des 30 dernières années au Burkina Faso.
Salif Diallo et l’affaire Dabo Boukary
Pourtant jamais Salif Diallo n’a été autant égratigné en l’espace de deux semaines. L’affaire Dabo Boukary du nom de cet étudiant de 7è année de médecine arrêté et qui n’a jamais été retrouvé vivant. Comme chaque année, le 19 mai plus précisément, l’Association nationale des étudiants burkinabè (Aneb) de l’Université de Ouagadougou a commémoré l’anniversaire de la disparition de leur camarade avec une présence remarquée dans les médias. A cette occasion, les anciens camarades du défunt et ceux d’aujourd’hui avec des activistes tels que l’avocat Me Prosper Farama et le Mouvement burkinabè des droits de l’homme et des peuples (Mbdhp) ont soutenu qu’il n’est pas question que ce crime passe par pertes et profits et que l’homme qu’ils estiment être la pièce maitresse de l’enlèvement de Dabo Boukary, Salif Diallo, ne peut se payer une virginité politique en assumant pas sa part de responsabilité dans ce crime. L’accusé se défend et dit avoir fait même libérer des étudiants lors de la répression de mai 1990 sur le campus.
Salif Diallo et les djembé bourré d’argent
Et ce n’est pas tout, le 23 mai c’était au tour du collectif citoyen pour l’agro écologie de donner de la voix en dénonçant l’introduction des OGM au Burkina du temps où Salif Diallo était ministre de l’agriculture. Salif Diallo en tant que ministre de l’agriculture aurait fait du coton OGM son cheval de bataille. L’Union nationale des producteurs de coton du Burkina (UNPCB), dirigée à l’époque par François Traoré aujourd’hui membre du bureau exécutif du MPP en tant que secrétaire adjoint chargé du monde rural, après avoir montré des signes d’inquiétudes a changé de position. Depuis septembre 2011, le nom de Salif Diallo est aussi collé à celui de transporteur de djembé bourré d’argent. Dans une interview accordé au journal français le journal du dimanche l’avocat Robert Bourgi, successeur de Jacques Foccart, qui a fait cas de financements occultes en provenance d’Afrique et le nom de Blaise Compaoré a été cité comme faisant partie des chefs d’Etat qui ont financé la campagne électorale de Jacques Chirac en 2002. « Un exemple qui ne s’invente pas, celui des djembés (des tambours africains). Un soir, j’étais à Ouagadougou avec le président Blaise Compaoré. Je devais ramener pour Chirac et Villepin 3 millions de dollars. Compaoré a eu l’idée, « connaissant Villepin comme un homme de l’art », a-t-il dit, de cacher l’argent dans quatre djembé. Une fois à Paris, je les ai chargés dans ma voiture jusqu’à l’Élysée. C’est la seule fois où j’ai pu me garer dans la cour d’honneur ! C’était un dimanche soir et je suis venu avec un émissaire burkinabè, Salif Diallo, alors ministre de l’Agriculture. Je revois Villepin, sa secrétaire, Nadine Izard, qui était dans toutes les confidences, prendre chacun un djembé, devant les gendarmes de faction… Les tams-tams étaient bourrés de dollars » témoignait Robert Bourgi dans les colonnes du journal français. Sur le plan politique, Salif Diallo a été au cœur du système Compaoré.
Salif Diallo, bête politique
Aux côtés de Blaise Compaoré depuis le coup d’Etat d’octobre 1987, l’ancien directeur de cabinet du Président du Faso serait celui qui était le gestionnaire des fonds secrets du régime. Ces fonds seraient alimentés essentiellement par les caisses des sociétés d’Etat telles que la Société nationale burkinabè d’hydrocarbure (Sonabhy), la Société nationale burkinabè d’électricité (Sonabel), la Loterie nationale burkinabè (Lonab), la Caisse nationale de sécurité sociale (Cnss), la Société des fibres et textiles (Sofitex). L’autre pratique selon certaines sources est qu’il y avait comme un rançonnage des opérateurs économiques. Le système consistait selon des informations a obligé les opérateurs économiques à verser des commissions pour alimenter la caisse noire. De l’argent qui contribuait à créer des partis politiques de toutes pièces et semer la division pour provoquer des scissions. Cette pratique politicienne axée sur le favoritisme et les cooptations qui empiètent sur les questions éthique et de morale serait ce qui a été utilisé pour casser le collectif des organisations démocratiques de masse et de partis politiques en appâtant les formations politiques qui ont accepté participé au gouvernement d’union nationale et à participer à l’élection législative de 2002 alors que le collectif prônait le boycott. Salif Diallo aurait été au cœur des tractations et de la marchandisation. Justement ceux qui l’ont connu, reconnaissent que c’est un redoutable politique et il vaut mieux l’avoir en ami qu’en ennemi conseille un ancien conseiller à la présidence du Faso. L’ancien ministre en charge de l’enseignement supérieur, auteur du discours d’orientation politique (DOP) du Conseil national de la révolution (CNR) et considéré comme l’idéologue de la révolution d’aout 1983 ne disait pas autre chose dans une interview accordée au journal Le Quotidien en juillet 2012. « Que tu l’aime ou pas, c’est une bête politique et je le respecte », avait affirmé Valère Somé à propos de Salif Diallo.
Henry BOLI/Zoodomail